Fiscalité post-expatriation : anticiper et sécuriser sa situation

Le départ vers la Suisse entraîne une reconfiguration complète des règles fiscales applicables. Résidence fiscale, nature des flux, traitement des revenus français : chaque paramètre doit être analysé pour organiser sa transition. La convention franco-suisse encadre les droits d’imposition, mais son application suppose une lecture détaillée des situations concrètes. Activité professionnelle, placements, dividendes, retraites ou plus-values : une approche transversale permet de limiter les risques de double imposition, d’adapter les déclarations aux obligations de chaque État et d’optimiser la structure patrimoniale.

 

Revenus d’activité : rattachement et effets transfrontaliers

 

Les revenus d’activité perçus en Suisse sont en principe imposés localement. Toutefois, certaines situations maintiennent un lien fiscal avec la France : contrat de travail non rompu, missions ponctuelles sur le territoire, prestations réalisées à distance ou télétravail régulier. Ces cas de figure peuvent conduire à une double imposition si la résidence fiscale n’a pas été clarifiée ou si le périmètre des flux n’a pas été segmenté. Pour les indépendants, les règles de territorialité des bénéfices et des cotisations sociales varient selon le lieu d’exercice effectif. Une cartographie précise des flux de travail permet d’anticiper les régimes applicables et d’éviter les requalifications.

 

Traitement fiscal des dividendes et flux patrimoniaux

 

Les dividendes perçus d’une société française par un résident suisse restent soumis à une retenue à la source. La convention permet de la plafonner à 15 %, sous réserve de dépôt des formulaires 5000 et 5001. Un crédit d’impôt peut être accordé en Suisse, selon les règles cantonales. Lorsque le contribuable détient une part significative du capital, une attention particulière doit être portée à l’articulation entre la fiscalité française des sociétés et le régime suisse de l’actionnaire. Le montage juridique (société holding, statut mère-fille) influe sur le niveau global d’imposition et sur les obligations déclaratives croisées.

 

Pensions, rentes et retraites : régimes distincts

 

Les pensions publiques restent imposées en France, indépendamment du lieu de résidence. Les retraites de source privée peuvent relever de la fiscalité suisse si le bénéficiaire y est résident. Les régimes complémentaires, les contrats d’assurance-vie ou les PER sont soumis à des règles spécifiques : les rentes viagères peuvent être taxées selon leur fraction imposable ou leur capital constitutif. Il convient également de vérifier les pratiques locales en matière d’imposition à la source et d’exonérations éventuelles. En cas de retour en France, certaines sommes perçues pendant l’expatriation peuvent faire l’objet d’une réintégration, avec effet rétroactif.

 

Cession d’actifs et plus-values : arbitrages et déclarations

 

La cession de titres ou d’immeubles situés en France reste imposable en France, même après l’expatriation. Pour les titres, l’exit tax peut s’appliquer au moment du départ, avec une exigibilité différée sous conditions. Pour les biens immobiliers, une imposition des plus-values est systématique, sauf exonération liée à l’usage ou à la durée de détention. En Suisse, les plus-values sur titres ne sont pas imposées pour les personnes physiques agissant à titre privé. Cette différence de traitement peut orienter la stratégie de cession ou de donation. La chronologie des opérations (cession pré-départ, vente différée) doit être articulée avec les critères de résidence retenus par les deux États.

 

Déclarations fiscales et formulaires transfrontaliers

 

L’expatriation modifie la nature des obligations déclaratives. Le formulaire 2047 permet de reporter les revenus perçus hors de France, en précisant leur traitement fiscal selon la convention. Le formulaire 3916 est requis pour tout compte bancaire détenu à l’étranger. L’omission de déclaration peut entraîner des amendes importantes, indépendamment du montant détenu. En Suisse, la déclaration de fortune, les revenus d’activité, les dividendes et les gains doivent être reportés selon les règles cantonales. La coordination des déclarations entre les deux pays impose une documentation rigoureuse, notamment pour justifier le traitement des revenus mixtes ou la répartition des charges déductibles.

 

Situations de blocage et procédures amiables

 

Lorsqu’un revenu est taxé dans les deux pays ou que la résidence fiscale est contestée, une procédure amiable peut être engagée sur la base de la convention. Cette démarche permet aux administrations française et suisse de statuer conjointement sur la répartition des droits d’imposition. Elle nécessite un dossier étayé, une cohérence dans les déclarations antérieures et une justification des liens économiques et familiaux. En parallèle, une demande de restitution ou de crédit d’impôt peut être formulée auprès de l’administration du pays de résidence, selon les conventions applicables. L’absence de régularisation peut entraîner des majorations et des intérêts de retard.

 

Mise en conformité patrimoniale et veille déclarative

 

Le changement de résidence impose de revoir la structuration du patrimoine : comptes bancaires, contrats d’assurance-vie, parts sociales ou biens détenus doivent être rattachés correctement aux juridictions compétentes. Il convient aussi d’adapter la stratégie successorale, les mandats de gestion et les statuts des sociétés familiales. Toute omission ou discordance entre les données bancaires, les déclarations fiscales et les documents notariés peut être relevée à l’occasion d’un contrôle ou d’un échange automatique d’informations.

 

Accompagnement global après expatriation

 

L’étude BERGEOT PAOLI Associés propose un accompagnement sur mesure, depuis l’analyse de la résidence fiscale jusqu’à l’optimisation des flux patrimoniaux et la coordination avec les partenaires bancaires, notariaux et comptables. Chaque situation est étudiée de manière spécifique, dans le respect du droit fiscal français et suisse, avec une attention particulière portée à la cohérence déclarative et à la traçabilité des choix réalisés. Cet accompagnement couvre l’ensemble des problématiques liées à l’imposition des personnes physiques dans un contexte transfrontalier, qu’il s’agisse d’organiser un départ, de sécuriser un revenu ou d’anticiper un retour.